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Histoires et contes d’entrepreneurs : Alain Ondet : « Comment réussir à concilier la rage d’entreprendre et le goût des autres »

Histoires et contes d’entrepreneurs : Alain Ondet : « Comment réussir à concilier la rage d’entreprendre et le goût des autres »

Entre récit de vie et conte légendaire, Gilles Flichy et Emmanuel de Lattre nous retracent le parcours d’Alain Ondet, dirigeant d’AVO Holding.


Histoire d’entrepreneur d’Alain Ondet par Gilles Flichy

Alain est le cadet d’une fratrie clermontoise de trois frères tous marqués par le sceau de l’entreprenariat sur la trace de leurs parents. L’école n’a jamais été ni son fort ni sa passion car Alain possède un don naturel qu’elle n’a jamais su reconnaître ni valoriser, celui qui caractérise les entrepreneurs. Sa façon d’apprendre emprunte plus volontiers les voies souvent méconnues et sous-estimées de l’apprentissage sur le terrain là où il faut bâtir avec ses mains, son instinct, son courage et sa détermination. Il aime façonner et transformer le réel et s’y emploi avec une détermination sans faille renforcée par l’obsession irrépressible d’atteindre les résultats qu’il s’est fixés et c’est avec la rage chevillée au corps qu’il s’emploie à les concrétiser quelles que soient les difficultés rencontrées sur son chemin.

Il est très reconnaissant à l’instinct sûr de ses parents qui avec beaucoup d’intelligence et de sagesse ont très vite acceptés qu’il sorte des sentiers battus. Il quitte alors le système scolaire et s’aventure dès la troisième vers les métiers de l’hôtellerie et de la restauration. Son père, industriel, a racheté en 1978 une entreprise sous-traitante de Michelin qui, en 1982, connaît des difficultés qui le conduiront au dépôt de bilan. Il rebondit et rachète avec sa femme un bar tabac avenue Anatole France. Alain démarre son apprentissage aux côtés de sa mère, commerçante dans l’âme, dans le bar tabac  snack familial. Neuf mois plus tard il décide d’aller apprendre le métier dans un restaurant à part entière et rejoint « la bohême » à Orcet.  Alain va connaître, à cette occasion, les premiers signes de reconnaissance dont il a tant besoin pour se réaliser. Il y obtient avec fierté  son premier certificat de travail, conservé précieusement, qui traduit avec justesse la personnalité prometteuse d’Alain sorti  second de son CAP.

Ayant fait la connaissance de sa future compagne Véronique, Alain rejoint en 1986 le Grand Hôtel au Mont Dore tenue par une femme exceptionnelle. Il évoque avec émotion ce repas collectif à l’issu d’une semaine très chargée où, royale, sa patronne leur a distribué à chacun un billet de 500 franc. Ce jour la Alain a compris l’impact de la reconnaissance sur la motivation et il ne l’oubliera jamais.
En 1986 Alain retourne à Clermont-Ferrand et décroche son premier
 CDI au Grand Hôtel à Ussel. Il devient ensuite chef de rang au Moulin de Villeroze à Riom puis rejoint de l’hôtel Gallieni rue Bonnabaud en tant que chef de rang puis second maitre d’hôtel. Il prend conscience que la cuisine a pris le pas sur la salle et décide de quitter Clermont-Ferrand pour évoluer alors que son fils Jess vient de naitre. La famille Foulquier vient de lancer un nouveau concept novateur, la livraison à froid de repas à partir d’une cuisine centrale. Elle propose à  Alain de prendre la responsabilité d’une cafeteria à Lyon 9 et  de manager une équipe de six personnes. En janvier 1990, Alain rentre sur Clermont-Ferrand et devient chef d’exploitation de la cuisine centrale à la tête de 30 personnes et découvre les achats, l’approvisionnement, le commercial et le recrutement.

S’offre alors une superbe opportunité, le groupe vient de racheter « Paris Repas » au Pré Saint Gervais dans le 93 et son patron le sollicite pour en prendre la direction. Alain discute âprement  ses conditions  de rémunération et réalise à cette occasion que « la vente fait partie intégrante de son ADN. » Il manage alors une équipe de 40 personnes de 12 nationalités différentes et assure 2500 couverts.

Il part en famille. Son salaire et son niveau de responsabilité s’envolent et il travaille énormément avec le soutien et les encouragements de Véronique. Avec Tati, son plus gros client, il découvre la clientèle très cosmopolite du sentier dont les codes et les goûts ne lui sont pas familiers. Son patron rachète une entreprise à Villecresnes dans le 94, « France Traiteur » qui absorbe Paris Repas et propose à Alain d’évoluer vers le poste de directeur d’exploitation de cet établissement de 75 salariés qui assure 5000 couverts par jour. Alain s’attèle à la réorganisation de la nouvelle structure et acquiert au passage la maîtrise des métiers de la boucherie et de la logistique. Il est alors confronté aux impératifs et aux exigences sans concessions de ses clients dont les livraisons requièrent une gestion acrobatique et complexe. Il reconnaît avoir appris, au contact de la diversité de ses équipes, à être plus attentif à la singularité de chacun et à pratiquer un management très adaptatif. Alain se dit alors que « tout est possible » et que « l’on a pour limites que celles que l’on veut bien se donner ». Voilà notre « bâtisseur fonceur » enfin libéré de ses doutes et interrogations et en possession de tous ses moyens. Alain me confie au passage que cette expérience  lui a appris à accorder plus d’importance à la façon dont les candidats ont été construits plutôt qu’à leur projet.

Un évènement va changer le cours de son destin. Son patron qui traverse des difficultés financières, s’associe  avec un personnage trouble. Se profile alors une période compliquée où la rage d’Alain de toujours progresser et performer se heurte à ce nouveau partenaire qui s’impose sans pour autant aider Alain. La tension et l’incompréhension monte chez Alain qui n’a pas le goût des intrigues de cour. Cet homme cherche à le démotiver par tous les moyens. Une situation délétère s’installe, leur relation se dégrade et les pressions et les menaces s’intensifient. 

Alain s’ouvre de cette situation à son patron et se heurte à une fin de non-recevoir. Ce dernier a perçu  qu’un ressort s’est cassé chez Alain et qu’il risque de ne pas tenir son engagement. La persistance des menaces et des intimidations et l’absence d’écoute de son patron vont précipiter le terme de leur association. Alain, échaudé, a pris quelques mesures de précautions. Il se sent trahi et choisit de privilégier la sécurité de ses proches qu’il rapatrie sur Clermont Ferrand. Il réfléchit sur son parcours et réalise qu’il s’est donné corps et âme à la tâche et qu’il a fait preuve d’une loyauté et d’une fidélité à toute épreuve sans réciprocité. En octobre 1993, sa fille Jennifer est née. Il s’en va en décidant d’infléchir le cours de son destin, fort d’avoir su économisé jour après jour, un capital appréciable.

Après avoir prêté mains fortes à ses frères Thierry et Jean Michel dans leur commerce de fruits et légumes « le Suprême », Alain saisit une opportunité et devient propriétaire, le 30 juin 1994, d’un magasin de fruits et légumes « l’Ile aux fruits » au cœur du triangle d’or du commerce Chamalièrois.
En décembre 1995, fort de sa réussite, il va racheter, avec son autre frère Jean Michel, « le Suprême » à son frère Thierry et y intègre « l’Ile aux fruits » en attendant de réaliser son objectif : créer une brasserie.

Alain se lance dans l’aventure du marathon. Il participe au marathon de New York en octobre 1998 et connait le choc de la consécration suprême. Il est enfin prêt à épouser sa vocation d’entrepreneur et se dit dans son for intérieur « ça aussi c’est possible. »
En mars 1998 Alain se sépare de Jean-Michel et rachète dans la foulée le restaurant brasserie « l’Aquarella » spécialisé dans les moules frites. L’activité marche très fort au centre-ville de Clermont et quand la situation évolue au profit de la périphérie, il s’ajuste prudemment suivant son flair et crée son second restaurant, à la fin des années 2000, à proximité du complexe Ciné Dôme. Confronté chaque année à l’arrivée de nouveaux concurrents, il prend la décision d’ouvrir, cinq ans plus tard, le Dôme Hôtel à proximité du restaurant. La complémentarité entre l’hôtel et le restaurant fonctionne à merveille et il décide de basculer du côté de l’hôtellerie. Il revend en octobre 2008 l’Aquarella et entreprend des travaux d’extension de l’hôtel. En 2009 afin de renforcer ses fonds pour développer son activité dans l’hôtellerie, il gère de façon profitable, pendant 9 mois, la concession du Puy de Dôme classée Site de France, avec son ami Gilles Bettiol.

Alors qu’il se rend au Stade de France en juin 2009 pour assister à la finale du top 14, il s’arrête à Bourges pour faire le plein et découvre une zone hôtelière où se construit un hôtel. Il se dit : « c’est là qu’il faut que j’ouvre un hôtel, ça va marcher. » Il félicite le chef de chantier pour son bel ouvrage, lui confie la construction d’un hôtel 2 étoiles à Bourges qui ouvre en décembre 2010 et le succès est à nouveau au rendez-vous. En 2011 l’histoire se répète à la sortie de Châteauroux, sur l’A20. Il ouvre un nouvel hôtel de 60 chambres en mars 2013 sous l’enseigne ACE Hôtel et à nouveau la prise de marché est immédiate.

En avril 2012 Alain rejoint le club APM Auvergne Nouveau Monde lors de sa création. C’est l’occasion inespérée pour lui d’acquérir une culture générale qui lui a manquée, d’approfondir sa pratique du management et de s’ouvrir sur le monde extérieur. Elu par ses pairs président du club, il se lance à corps perdu dans cette nouvelle aventure qui lui permet de progresser et de vivre une expérience humaine exceptionnelle. Alain a redéfini les axes clefs et les valeurs phares de son entreprise : la confiance, l’esprit de service, la solidarité, l’autonomie, l’innovation et le sens du commerce. Alors qu’il vient de rénover l’hôtel de Clermont Ferrand pour se conformer aux nouvelles attentes de ses clients, Alain est aujourd’hui heureux. Il a obtenu les choses qui lui tiennent le plus à cœur, à savoir l’indépendance, la liberté et la maitrise de son métier de dirigeant. Il ne peut s’empêcher d’évoquer son épouse Véronique qui l’a toujours épaulé et suivi. Conscient d’avoir réussi sans jamais prendre de risques inutiles et d’avoir nourri ses deux passions que sont le sport et l’œnologie, il souhaite transmettre à ses proches ses valeurs et son expérience. Il s’abandonne en confiance à l’instant présent et s’imagine, tour à tour, seul et libre sur l’atlantique, les pieds dans l’eau, bercé par le va et vient incessant de la houle, puis entouré d’amis dans sa cave d’Aubière en train de déguster avec délectation et en connaisseur un verre de « Côte-Rôtie », son nectar préféré. Le tout accompagné des fromages et de la charcuterie qui fleurent bon le terroir auvergnat. Face à ces moments privilégiés, il s’en remet en toute quiétude à la bienveillance de « dame nature » en se persuadant que rien n’est impossible et qu’il suffit tout simplement de se dire « j’en suis capable » pour renouer durablement avec le succès. Il est fier d’avoir su à la fois s’accommoder de toutes les situations avec souplesse et pugnacité et cultiver, en « mec bien »,  la franchise, la loyauté et la fraternité.

Confrontation de l’histoire d’Alain Ondet à l’univers des contes par Emmanuel de Lattre

Vous connaissez sans nul doute l’histoire de ce village qui eut la désagréable surprise de constater, par un matin d’été pourtant généreux, que son sage venait de décéder. La tristesse et même le désespoir dans lesquels cette absence laissait les habitants du village, les mirent dans un état presque léthargique jusqu’à ce qu’un adolescent réveille tout le monde : ‘Pourquoi n’allons-nous pas chercher son jeune frère ?’

Après l’avoir questionné, les habitants restent étonnés d’apprendre que leur sage aurait eu un jeune frère avec lequel il fût éduqué, qui en sait tout autant que lui et qui habite dans la forêt sur le versant opposé de la Montagne Sacrée. Ce jeune frère pourrait le remplacer et il faut au moins aller voir… Alors bien sûr, le village se met vite d’accord pour missionner le jeune homme jusqu’à la Montagne Sacré pour s’enquérir de l’existence de ce jeune frère et au mieux, le ramener.

Le jeune homme traverse fermes et hameaux, villages et cités, découvrant l’économie du troc et les surprises nourricières de la rencontre. Partout où il passe, il reçoit gîtes et couverts contre ce qu’il sait faire de mieux : raconter les histoires que le vieux sage du village lui narrait. Elles parlent toutes de franchise, de loyauté et de fraternité. Il parcourt ainsi la distance qui le séparait de la Grande Montagne, derrière laquelle il finit par découvrir une clairière, au sein de laquelle un feu est allumé, autour duquel trois hommes sont assis. Il s’assoie avec eux. Ils le questionnent alors sur le chemin qu’il a suivi et les épreuves qu’il aurait peut-être rencontrées. Il leur raconte toutes les histoires du vieux sage qui lui ont permis de venir jusqu’à eux. Alors, ils se lèvent tous les trois et lui demandent de retourner par le même chemin jusqu’à son village. Le plus jeune frère du sage l’y attendra.

Sur son chemin de retour, le jeune homme constate que les endroits où il s’était arrêté à l’aller se sont métamorphosés. Les histoires qu’il y a déposées ont fleuri et dans la maison où il eut à manger, il trouve maintenant un lieu de réception propice au partage et à l’échange. Et dans la ferme où il eut un coin sec dans la paille accueillante par une nuit pluvieuse, il trouve maintenant une auberge accueillante et chaleureuse.

Quand il arriva dans son village, personne d’autre que sa famille et les habitants du village ne l’attendait. Il comprit que personne d’autre que lui ne viendrait, qu’il était devenu le sage de son propre village. Il était même devenu le village. Il comprit alors que les histoires du sage ont le pouvoir de faire grandir le meilleur en chacun.

Ainsi en va-t-il de certains parcours de vie qui, sans toujours éviter comme ici les embuches, arrivent toutefois à saisir chaque occasion pour la faire fleurir. Un savoir-faire qui ne s’apprend sur aucun autre banc que ceux sur lesquels se reposent parfois les voyageurs. Un voyage qu’Alain continue de raconter comme on raconterait l’une des histoires secrètes de ce vieux sage.

Réaction d’Alain Ondet à la découverte de ce conte

Ce conte reflète joliment mon parcours professionnel, fait de rencontres, d’échanges, d’opportunités, d’amitiés et d’engagements. Tant qu’à la sagesse, elle se construit également au fil du temps, cela reste un voyage au long court, pierre après pierre, un chemin de construction intérieur et que les seules personnes qui peuvent en juger son par le fait, nos proches et nos amis.



Un article de la rédaction du Journal de l’éco

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