Art, culture, divertissement

Le mécénat au service de l’épanouissement collectif

Le mécénat au service de l’épanouissement collectif
Sylvain Jourdy, Jean-Marc Grangier, Véronique Braesco, Béatrice Mestre, Yves Boirie, Virginie Garcia, Fabrice Gachon, Françoise Bernard, Monique Pagnet et Boris Gravière

Après plusieurs années d’hésitations, le mécénat est devenu un élément indispensable du cercle vertueux qui favorise l’activité culturelle, le développement économique et l’attractivité territoriale. La Scène nationale de Clermont-Ferrand en est la preuve.


« Le mécénat ne saurait se réduire à l’argent et correspond aussi à une mobilisation de toutes les forces vives d’une ville, d’une région au service de l’épanouissement individuel et collectif. Il s’agit d’aider les citoyens à se sentir bien dans leur cadre de vie, à se rencontrer pour échanger, à quitter les vieux schémas et rêver l’avenir ». Les propos de François Robert, secrétaire du Conseil d’administration de la Comédie de Clermont-Ferrand, résument l’état d’esprit des mécènes de la Scène nationale qui se sont réunis le 18 juin dernier à l’occasion de la présentation de la saison 2014/2015 pour échanger sur leur action et la faire évoluer .

Un long cheminement

Cette vision très constructive est l’aboutissement d’un long cheminement qui ne s’est pas fait sans heurts. Les premières réflexions sur les perspectives du mécénat ont été initiées il y a une dizaine d’années, suite à la loi 83, par l’adjoint clermontois au développement culturel, avec la complicité de Jacques Rigaud, président de l’Admical, la CCI et la Drac. Mais le microcosme culturel et encore moins, les entreprises, n’étaient prêts. Le premier craignait l’ingérence, les secondes, un désengagement partiel des collectivités et de l’État.

La Fondation Michelin, un moteur

Depuis 2013, la donne a changé. Devenu le mécène principal de la Scène nationale à travers sa Fondation, le Groupe Michelin a entrainé dans son sillage des PME régionales ainsi que des particuliers. De son côté, la Comédie a professionnalisé cette activité créant un poste qui lui est spécialement dédié. « Pour Michelin, œuvrer pour le développement culturel de la ville est une action en faveur de son attractivité, explique Sylvie Weiss, chargée du mécénat et des partenariats à la Scène nationale. Vis-à-vis des cadres que la multinationale souhaite attirer à Clermont-Fd ainsi que de leurs familles, la richesse de l’offre culturelle est un argument essentiel ».

Actuellement, la Comédie est soutenue par onze entreprises mécènes, une vingtaine de mécènes particuliers, trois entreprises partenaires ainsi que des partenariats avec la fédération viticole du Puy-de-Dôme et l’association des fromages d’Auvergne.

Moins 60 % des dons en réduction d’impôt

« Pour une entreprise de transport , contribuer à la culture c’est d’abord valoriser son image, explique Virginie Garcia, co-gérante d’Europa Course. Notre engagement est récent, mais important pour notre activité car nous rencontrons beaucoup d’entreprises et sommes en train de constituer un nouveau réseau ».

Autre élément positif pour les mécènes, la réduction d’impôt qui représente 60 % du don et qui rend l’investissement tout à fait supportable même pour une petite structure. Mêmes conditions fiscales (moins 65 % du don) pour les mécènes particuliers comme Béatrice Mestre, endocrinologue à Clermont-Ferrand et fidèle à la Comédie depuis 18 ans. « Le théâtre a pris une place importante dans ma vie, je vois entre 20 et 28 spectacles par saison et je ne m’en lasse pas. Nous avons la chance d’avoir une programmation extraordinaire. Jean-Marc Grangier a un peu bousculé le public mais l’art est là pour déranger, pour interroger et, finalement, pour nous ouvrir. Ma participation est de près de 300 euros par saison, en dehors de mon abonnement. Et j’aurais fait plus, si mon emploi du temps me le permettait ».

Une visibilité accrue

Sans ces avantages fiscaux, mais avec une visibilité et une promotion accrue, les partenariats sont une autre façon de soutenir la création. C’est le cas de Citroën qui prête à la Scène nationale une Némo et met à sa disposition une Picasso de 7 places. « C’est très agréable et valorisant, confie Boris Gravière, vendeur flotte chez Citroën. Mettre nos voitures au service du spectacle est notre manière d’y « contribuer » un peu… De plus, cette activité nous ouvre vers de nouveaux horizons, vers de nouvelles rencontres dans un nouveau contexte, elle nous « élève » l’esprit de la mécanique ».

Négocier avec les plus grands

Agir ensemble sans que les uns se substituent aux autres, voilà ce que la Comédie, les pouvoirs publics et les entreprises sont en train de réussir aujourd’hui. Le directeur artistique, Jean-Marc Grangier, a conservé toute sa liberté décisionnelle mais se sent plus fort pour négocier avec les plus grands du spectacle contemporain. Ainsi, l’un de ses monstres sacrés, Robert Wilson fera un détour à Clermont-Fd en décembre prochain, avec une version très avant-gardiste des Nègres de Jean Genet. Par ailleurs, l’État et les collectivités n’ont pas baissé leurs aides et encouragent l’accès du plus grand nombre à la culture. Ce qui permet à un jeune abonné de moins de 27 ans de voir un spectacle pour seulement 7 euros. Un effort complété par certains mécènes qui prennent en charge une partie des coûts d’abonnements et traduisent une solidarité qui ne sera pas sans retour.

Clermont-Ferrand, capitale européenne de la culture en 2026 ?

« Les entreprises contribuent à notre action en faveur de la culture, ce qui pour elles est, également, une forme d’investissement, c’est du donnant-donnant, souligne Olivier Bianchi, le maire nouvellement élu de Clermont-Ferrand. Elles ont pris conscience de la valeur ajoutée que représente l’offre culturelle pour l’attractivité économique et sont aujourd’hui de plus en plus nombreuses à suivre l’exemple des précurseurs en la matière, comme les laboratoires Théa qui soutiennent depuis des années le Frac ».

Et ce n’est pas un hasard si l’ancien adjoint à la culture ambitionne de hisser Clermont-Ferrand au rang de capitale européenne de la culture en 2026. Il sait que, désormais, il pourra compter dans ce sens sur un allié de taille, le monde économique régional.

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Un article de Théodora Yonkova

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