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Mathieu-Robert Jourda : Changer de modèle économique et changer de modèle politique. La désuétude de l’un entraîne celle de l’autre

Mathieu-Robert Jourda : Changer de modèle économique et changer de modèle politique. La désuétude de l’un entraîne celle de l’autre

Une chronique de libre opinion de Mathieu-Robert Jourda : le lancement de l’élection présidentielle vient de rendre éclatant qu’une distinction gauche-droite n’a plus aucun sens comme critère de choix de l’homme qui présidera au destin de la France. Notre République, quatrième du nom, a fonctionné depuis bientôt 60 ans selon une alternance de deux doctrines, l’une qui a comme valeur suprême la protection maximale du bien-être pour tous et l’autre qui a comme valeur suprême la récompense des savoir-faire.


L’essentiel des doctrines politiques est que la richesse globale de notre nation doit être répartie, pour la gauche, selon le critère de la fraternité, et pour la droite, selon le critère du mérite économique. Votent donc pour la gauche les citoyens qui ont des revenus qu’ils considèrent trop modestes et aussi les citoyens aisés qui approuvent moralement cette revendication, on les dénomme socialistes. Votent pour la droite les citoyens qui ont un revenu confortable et qui estiment qu’ils l’ont bien mérité, on les appelle conservateurs.

On peut résumer ces aspirations comme une demande de protection d’une part et une demande de récompense d’autre part. Lorsque ces deux catégories de désirants font partie de la même nation et qu’ils se soumettent à une autorité suprême, ils attendent évidemment de leurs gouvernants qu’ils prennent les dispositions nécessaires pour la satisfaction de leurs besoins. Si la direction du pays est de nature royale ou dictatoriale, elle s’appuie tout naturellement sur les riches, donc sur les conservateurs, sauf le cas où les pauvres sont si majoritaires en nombre et si révoltés qu’ils détrônent leurs princes et instituent un pouvoir protecteur. Les Russes et les Chinois ont vécu cette conjoncture mais hélas la richesse pour tous n’est pas survenue et ils ont donc opté à nouveau pour un gouvernement des experts en création de richesse.

Dans une nation  démocratique moderne, les citoyens ont le choix entre des représentants des pas-riches qui n’arrivent pas à être riches et des représentants des riches qui savent comment on le devient. Cruel dilemme : d’un côté le savoir-faire économique et de l’autre côté l’indigence matérielle et intellectuelle. Alors quand le peuple se sent majoritairement trop défavorisé, il porte la gauche au pouvoir, mais dès que les conditions de vie s’améliorent, il confie la direction de l’économie à la droite parce qu’elle sait, elle, faire fructifier les acquis. C’est pourquoi nous avons assisté en France depuis 1870 à une alternance gouvernementale inégale de la gauche qui réclame une plus grosse part du gâteau et de la droite qui sait fabriquer le gâteau.

Catastrophe depuis dix ans : la droite ne démontre plus sa capacité de contribuer à une richesse collective qui laisse une part convenable aux défavorisés, au contraire les riches deviennent de plus en plus riches et les pauvres de plus en plus nombreux, et la gauche au pouvoir ne sait même pas diriger la machine économique pour assurer du revenu pour tous. C’est pourquoi notre prochain Président sera un homme qui n’est ni de gauche ni de droite mais qui promet de trouver une solution de nature exclusivement économique à la faiblesse du développement et aux insupportables inégalités. Le fait qu’il soit nul en Economie et même qu’il n’ait comme référence que d’avoir su gérer des fortunes – « banquier d’affaires » chez Rothschild – ne lui vaut aucune méfiance populaire, son atout majeur est d’incarner la destitution des partis sur le double plan de l’apport de protection et de l’apport de récompense.

Or l’action la plus nécessaire pour que notre pays connaisse un bien-être matériel généralisé et équitable est le changement de modèle économique et pour cela il faut écouter les experts en économie et non pas les politiciens professionnels. Certes la gestion de la Cité et la promotion d’une citoyenneté de bon aloi doivent être confiées à des représentants du peuple mais pour être nos élus ceux-ci ne peuvent plus se prévaloir d’un savoir-faire économique, il faut qu’ils incarnent essentiellement une définition de l’être-ensemble de notre société nationale. Il  faudra du temps pour que cette mutation se produise et il faut donc accepter que le règne Macron soit le préambule maladroit mais significatif de ce changement historique inéluctable.

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