Artisanat & services

Thierry Courtadon, sculpteur : « La lave de Volvic coule dans mes veines ! »

Thierry Courtadon, sculpteur : « La lave de Volvic coule dans mes veines ! »
Thierry Courtadon

La pierre de Volvic fût très utilisée dans les constructions en Auvergne. La cathédrale de Clermont-Ferrand en est l’un des plus beaux exemples. Pour réaliser ces œuvres monumentales, il fallait des sculpteurs aguerris, des pierreux. Au nombre de près de 500, il y a encore une cinquantaine d’années, il ne reste aujourd’hui que deux ou trois sculpteurs de pierre à Volvic. Thierry Courtadon fait partie de ceux-là et il espère bien transmettre le flambeau à ses propres enfants. Rencontre.


« Je suis fils, petit-fils et arrière petit-fils de tailleurs de pierre. J’ai été élevé dans la matière depuis que je suis tout petit et j’ai suivi une formation aux beaux-arts à Lyon, plus précisément les cours d’une école spécialisée dans l’ornementation. », raconte Thierry Courtadon, aujourd’hui gérant de l’atelier de taille de pierre de Volvic qui porte son nom. Agé de 44 ans, il dirige l’atelier Courtadon, tout à la fois avec les techniques ancestrales transmises par ses prédécesseurs et avec les nouvelles technologies dont il est un amateur éclairé. Conscient d’avoir fait entrer l’atelier de plein pied dans le XXIe siècle lorsqu’il reprend l’entreprise de son père, il n’en oublie pas moins ses débuts dans la profession : « Reprendre le métier ? Je n’ai même pas eu le choix. C’était une évidence. C’est ma vie, mon métier. J’ai commencé très jeune dans les guêtres de mon père. Dès l’age de dix ans, je venais à l’atelier pour faire de petites sculptures. »

L’ambiance est tout autre aujourd’hui. La technologie est passée par là. Dans les 1 000 m2 de l’atelier, les pelleteuses, scies et machines numériques côtoient les outils d’autrefois. Un savant mélange qui permet de produire toute à la fois des sculptures monumentales, contemporaines, figuratives, de décoration, des monuments funéraires et de nouveaux concepts, de nouveaux produits qui n’avaient jamais été imaginés jusque là avec de la lave. Parmi ces derniers, l’atelier Courtadon s’est engouffré dans les arts de la table et fournit avec fierté les restaurateurs les plus renommés de France et du monde entier, à l’image de l’hôtel Bristol à Paris qui arbore des dessous de plats en pierre de Volvic sur les tables de son restaurant. «Dans un concept plus monumental, mais non moins intéressant, nous venons également de réaliser un sofa pour la marque Peugeot entièrement sculpté dans la lave. Il est exposé au salon de Milan du design. », indique Thierry Courtadon. Preuve de sa maîtrise de la matière s’il en fallait, l’Atelier Courtadon est capable de réaliser des ressorts en pierre qui possèdent une certaine élasticité. Bien moindre que le métal, bien entendu, il y a toujours un point de rupture assez rapide. Mais quelle prouesse !

Nous sommes parmi les derniers sculpteurs à Volvic

La clientèle de l’Atelier Courtadon est locale, nationale et même internationale. « Nous avons la chance d’avoir de nombreuses commandes venant de l’étranger. Au niveau local, nous avons réalisé par exemple un Bibendum pour Michelin, entièrement taillé dans la pierre de Volvic, qui se trouve aujourd’hui sur le site des Carmes, à Clermont-Ferrand. Il m’avait été commandé par Edouard Michelin. Ce type de réalisation est très important pour nous car ces très bons clients font office d’ambassadeurs de notre savoir-faire à un niveau international. », se félicite Thierry Courtadon. Outre d’autres grands groupes comme Carrefour ou Danone, des institutionnels font également partie de la clientèle de l’atelier Courtadon. Les réalisations sont nombreuses pour les conseils généraux, le Conseil régional et différentes mairies d’Auvergne. La concurrence est faible reconnaît Thierry Courtadon : « Nous n’avons pas de concurrence car nous nous sommes créés notre propre identité à travers notre travail. Nous sommes parmi les derniers sculpteurs à Volvic. Mis à part nous, seuls 2 ou 3 petits artisans, qui n’ont pas forcement d’atelier, continuent à produire. Mais à notre échelle, nous sommes les seuls capables de sculpter des pièces de 80 à 100 tonnes. »

Lorsque l’on demande à Thierry Courtadon ce qu’il préfère dans son métier, il répond : « La chose principale, c’est d’élaborer, de créer, d’inventer des concepts. Voilà ma détermination. C’est pour cela que nous avons des projets. Nous avons fait une belle exposition cette fin d’année au Conseil général et nous avons d’autres expositions qui sont en train de se mettre en place, notamment une à Paris. » Les projets de développement sont également nombreux : « Nous allons développer encore plus la sculpture monumentale. Nous avons aussi pour objectif de créer une nouvelle société qui va se consacrer essentiellement à la décoration, aux objets décoratifs de luxe. » L’aventure, qui se poursuit donc depuis plusieurs générations est belle et riche en développements pour l’Atelier Courtadon. Mais quel sera l’avenir ? « J’ai un fils qui a neuf ans et une fille de 14 ans. J’espère que la relève sera assurée parce que je ne vous cache pas que c’est mon plus grand désarroi. A l’époque de mon grand-père, il y avait plus de 500 tailleurs de pierre à Volvic qui ont tous disparu. Essentiellement tournés vers le marché du funéraire, ceux-ci n’ont pas vu venir les monuments en granit et n’ont pas su se reconvertir dans une autre activité. C’est pourquoi nous faisons preuve de créativité pour transmettre à nos enfants une activité pérenne. Car après nous, si nous disparaissons, il n’y aura plus de sculpture à Volvic. »

 

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Un article de Thomas Fauveau

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