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ERDF : « L’égalité professionnelle, nous avons tous à y gagner »

ERDF : « L’égalité professionnelle, nous avons tous à y gagner »
Olivier Duhagon et Bertrand Pouilloux – ERDF

La féminisation des emplois à ERDF est un enjeu crucial et fait l’objet d’un nouveau plan d’action mis en place sur la période 2012-2015. Olivier Duhagon, directeur des ressources humaines pour la direction interrégionale Auvergne Centre Limousin et Bertrand Pouilloux, directeur régional Auvergne ont répondu aux questions du Journal de l’éco.


Le Journal de l’éco : Pouvez-nous nous rappeler l’impulsion qui est donnée au niveau national à la féminisation des métiers chez ERDF ?

Olivier Duhagon : Il y a une forte impulsion depuis 2008 puisqu’un premier accord a été mis en place sur la période 2008-2012 et nous sommes à présent dans le cadre d’un deuxième accord sur la période 2013-2015 qui vise à favoriser l’égalité professionnelle. C’est un accord qui fait l’objet d’un consensus avec l’ensemble des partenaires sociaux. Ce dernier se décline en trois objectifs forts : augmenter la part des femmes dans nos effectifs de 15 à 20 %, favoriser les parcours professionnels en accueillant les femmes dans l’ensemble de nos métiers à tous les niveaux de responsabilité (nous avons beaucoup de métiers techniques) et garantir l’égalité salariale. Nous avons pu noter par le passé des inégalités salariales à niveau de responsabilité égale, ce qui est parfaitement intolérable.

Le Journal de l’éco : Existe t-il encore actuellement des inégalités salariales entre femmes et hommes au sein d’ERDF?

Olivier Duhagon : De moins en moins heureusement. Nous les combattons. Chaque année, nous faisons une étude salariale qui permet de repérer ces inégalités salariales. Nous devons rester vigilants car, dans le cadre de l’appréciation, nous devons veiller à ce que les primes soient bien affectées de façon équitable à l’ensemble des hommes et des femmes. Aujourd’hui, cet objectif est atteint.

Le Journal de l’éco : Quelles actions menez-vous pour faire évoluer les mentalités ?

Olivier Duhagon : Un kit a été adressé à l’ensemble des 150 managers de la région Auvergne. Il présente l’ensemble de nos accords et ce que nous attendons d’eux. « J’agis pour une évolution durable des mentalités .», « Je développe la mixité des emplois en recrutement. », « J’encourage l’évolution professionnelle des femmes. », « Je maintiens durablement l’égalité salariale. », « Je garantis un meilleur équilibre vie professionnelle/vie privée. » Voici quelques exemples de ce qui est préconisé dans ce kit. Nous avons également adressé une brochure à nos salariés qui présente l’ensemble de nos engagements. L’idée est de montrer qu’il faut changer de mentalité et que nous avons tous à gagner à féminiser nos équipes de travail.

Ce n’est plus le diplôme qui compte, c’est l’habileté, c’est la capacité à accéder à un métier technique

Le Journal de l’éco : Comment les politiques nationales de réductions des inégalités hommes/femmes sont elles déclinées au niveau régional ?

Olivier Duhagon : Il faut tout d’abord changer notre méthode de recrutement au niveau régional. Ce n’est plus le diplôme qui compte, c’est l’habileté, c’est la capacité à accéder à un métier technique. Certaines femmes, qui ont toutes les compétences sans avoir le diplôme, passent par des contrats d’apprentissage et de professionnalisation afin d’acquérir les savoir-faire nécessaires en électrotechnique. Nous avons déterminé des objectifs en termes de féminisation des effectifs ; objectifs clairement définis dans les contrats de nos directeurs. A la fois sur le taux de recrutement en embauche directe qu’en alternance. A terme, les comités de direction des régions devront être composés à 20 % de femmes. Pour le moment, seule la moitié des régions de France respecte cet engagement.

Le Journal de l’éco : Concrètement, allez-vous dans les écoles, dans les salons professionnels pour recruter ?

Olivier Duhagon : Bien entendu ! Nous intervenons dans différentes écoles auprès des conseillers d’orientation pour dire qu’ERDF recrute dans des métiers techniques et que ces métiers-là sont ouverts aux candidatures féminines.

Le Journal de l’éco : Pouvez-vous nous donner des éléments chiffrés sur la progression de la féminisation ?

Olivier Duhagon : Sur la période 2008-2013, nous progressons de 15 à 17 % , ce qui n’est pas suffisant. Il y a un vrai coup d’accélérateur à donner pour atteindre 20 % de femmes dans nos effectifs en 2015. Nous visons 25 % de recrutement de femmes dans nos métiers techniques par l’alternance. Nous avons progressé également sur nos comités de direction puisque nous sommes passés de 15 à 17 % de femmes dans nos équipes de direction. Et là où nous avons le meilleur résultat et où l’on voit que les mentalités commencent à changer c’est sur la part des recrutements. Qu’est ce qui nous fait progresser ? Nous recrutons de plus en plus de femmes et nous sommes passés au niveau national de 15 % de femmes dans nos recrutements à 25 % en 2013. Ce qui est très ambitieux par rapport à la typologie de nos métiers.

Le Journal de l’éco : En favorisant l’accès aux métiers techniques pour les femmes, n’avez-vous pas peur de faire de la discrimination positive ?

Olivier Duhagon : C’est très intéressant parce que, justement, cette question fait partie du kit que nous avons adressé à l’ensemble des salariés : L’égalité professionnelle n’encourage t-elle pas la promotion de femmes au détriment d’hommes plus compétents ? Et bien non, clairement non ! Nous raisonnons à compétences égales. Notre enjeu est de casser l’inégalité hommes/femmes. Ce n’est pas pour en créer une nouvelle. Nous avons tous à gagner de la diversité. Avec 85 % d’hommes dans nos équipes, nous pensons tous de la même façon. L’intérêt de la diversité est d’avoir des diplômes, des origines géographiques, des origines culturelles, des sexes différents. C’est une grande richesse que cette diversité.

Notre idée est bien de diversifier notre corps social et nos recrues

Le Journal de l’éco : Bertrand Pouilloux, en Auvergne, quelles sont les actions que vous menez pour l’intégration des femmes dans vos équipes ?

Bertrand Pouilloux : Depuis 3 ans, nous recrutons environ 50 personnes par an et, dans cette dynamique, nous avons intégré la volonté d’accueillir des jeunes femmes dans l’entreprise avec notre slogan : « Chez ERDF, tous les métiers se conjuguent au féminin ! » Notre idée est bien de diversifier notre corps social et nos recrues. Nous avons des métiers qui sont passionnants dont nous pouvions penser historiquement qu’ils étaient plutôt masculins et nous découvrons à l’exercice que ces métiers sont exercés avec un grand professionnalisme par des femmes. Je pense à une jeune femme qui exerçait un metier d’accueil tertiaire et qui s’est reconvertie dans un métier technique. Aujourd’hui, elle n’imaginerait pas revenir en arrière. Réaliser des interventions techniques chez nos clients, c’est changer un compteur, c’est avoir un contact client, c’est être à l’extérieur et nous démontrons tous les jours que des femmes agissent avec compétence et engagement à ERDF en Auvergne.

Le Journal de l’éco : Menez-vous des actions avec le rectorat ?

Bertrand Pouilloux : Chaque année, nous renouvelons notre convention avec l’Académie de Clermont-Ferrand, convention qui intègre un panel d’actions visant à favoriser le rapprochement du monde de l’éducation de celui de l’entreprise. Plusieurs salariés d’ERDF en Auvergne interviennent dans des collèges, lycées ou formations supérieures pour faire connaître les métiers d’ERDF, avec des actions spécifiques pour attirer les jeunes filles vers les filières techniques. Avec le rectorat et la délégation régionale aux droits des femmes, nous intervenons également auprès des jeunes pour leur faire prendre conscience des stéréotypes métiers hommes-femmes encore ancrés dans nos sociétés. Nous travaillons beaucoup avec les bacs professionnels, les BTS électrotechniques, et, depuis plusieurs années, nous avons la volonté d’intégrer dans nos équipes des alternants qui s’investissent dans des métiers techniques.

Le Journal de l’éco : Pouvez-vous nous parler du réseau des femmes cadres au sein d’ERDF Auvergne ?

Bertrand Pouilloux : Il s’agit d’un réseau national dénommé Interp’elles et qui est en lien avec les Ressources humaines de l’entreprise. Il y a des idées qui émergent lors de réunions au niveau régional et qui remontent, en fonction de leur pertinence, au plus haut niveau de l’entreprise, notamment sur les problématiques en lien avec la féminisation des métiers et l’accès des femmes aux plus hautes fonctions à ERDF. Pour notre direction régionale, ce réseau est un appui pour toutes les actions que nous menons avec le rectorat pour attirer les jeunes filles vers nos métiers et plus généralement vers les filières techniques.

Le Journal de l’éco : Quel est votre point de vue personnel sur l’intérêt de féminiser les emplois techniques en Auvergne ?

Bertrand Pouilloux : Mon point de vue est évidemment positif. Et ce sous plusieurs angles. D’abord, comme le disait Olivier Duhagon, cela génère de la diversité.  Que ce soit de la part d’un manager ou d’un technicien sur le terrain, il n’y aura pas la même approche ni la même perception des enjeux et des moyens d’atteindre les objectifs. J’ai la certitude que ce partage et cette confrontation seront des plus-values pour l’entreprise. Un poste exercé aujourd’hui par un homme et remplacé le lendemain par une femme ne sera pas exercé de la même façon, mais ne sera pas moins bien exercé. Cela permet d’ouvrir de nouvelles perspectives dans la façon de travailler. Il faut bien le dire aussi, la présence d’une femme au sein d’une équipe masculine provoque un phénomène d’apaisement et de bienveillance. Nous sommes sur des métiers qui nécessitent beaucoup de réflexion en amont de l’action et la confrontation des approches entre une femme et un homme va permettre de faire émerger des bonnes pratiques, voire des innovations.

Le Journal de l’éco : que découvrez-vous avec l’arrivée de ces jeunes femmes dans des métiers techniques ou d’encadrement ?

Bertrand Pouilloux : Sans doute, la notion de faire différemment. Nous avons très longtemps eu des populations masculines dans ce type de métiers techniques et nous découvrons que les choses évoluent beaucoup avec la féminisation des emplois.  J’ai vu une responsable d’équipe femme qui, au début, a suscité de l’étonnement de la part de la quinzaine d’hommes qu’elle manage, et peu à peu cette équipe est devenue protectrice vis-à-vis de son chef. C’est vraiment un très beau challenge en matière de management pour des jeunes femmes qui ont envie de s’investir.

Le Journal de l’éco : Vous avez embauché une jeune femme en tant que responsable d’une base d’exploitation. C’est une première en Auvergne. Pourquoi avoir fait ce choix ?

Bertrand Pouilloux : Elle est ingénieur et elle témoignait l’envie de faire ce métier. Elle a été la bonne candidate au bon moment. Encore une fois, nous raisonnons à compétences égales et elle n’a pas pris la place d’un homme. Elle a pris la place qui lui revenait. Cette jeune femme encadre 12 techniciens d’intervention réseau et elle occupe ce poste depuis six mois. Il n’y a aucune raison de regretter ce choix et cette décision. Tous les jours, cette jeune femme nous montre que l’on peut adapter nos méthodes de management, que l’on peut travailler différemment.

Le Journal de l’éco : Pouvez-nous nous donner des éléments chiffrés pour la région Auvergne ?

Bertrand Pouilloux : ERDF en Auvergne c’est environ 50 recrutements statutaires par an et 25 recrutements d’apprentis. Nous avons l’ambition, cette année, de recruter 20 à 25 profils féminins sur ces 75 postes. Avec, bien entendu, un véritable objectif de ne pas limiter ces recrutements au domaine tertiaire. Je considérerais que nous avons réussi si nous recrutons des femmes dans des métiers techniques. En 2013, nous avons eu 3 recrutements dans les métiers techniques, c’est un premier pas. Aujourd’hui, rien ne nous incite à regretter ces recrutements, bien au contraire.  Au-delà de recruter des jeunes femmes dans notre entreprise, je me féliciterai également de parcours professionnels de femmes qui sont entrées dans des métiers tertiaires dans notre entreprise si nous arrivons à les attirer vers les métiers techniques.

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Publi-rédactionnel

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