Tourisme, restauration

La Baraque d’Aubiat : la convivialité et l’échange humain autour d’une bonne table.

La Baraque d’Aubiat : la convivialité et l’échange humain autour d’une bonne table.

Quoi de plus banal que se rendre dans un restaurant? On entre, on s’assoit, on commande, on déjeune ou on dîne, on paye, on quitte les lieux. La routine en somme. Et pourquoi ne pas aller au restaurant différemment? Lassé(e) de la ville, de sa grisaille et de sa cacophonie? Vous souhaitez déguster vos plats dans un cadre naturel et propice au calme ? Il suffit pour y remédier de prendre sa voiture et de foncer dans la campagne, dans le Plateau du Cézallier à 1040 mètres d’altitude. Quand vous vous retrouverez « au milieu de nulle part, dans un océan de silence », vous y trouverez alors sans doute cette petite ferme reconvertie en auberge, la Baraque d’Aubiat où Jacqueline et Jacques Jarry vous accueilleront à bras ouverts. Dépaysement et chaleur humaine garantis!


L’épicentre d’un patrimoine touristique très riche, un exceptionnel point de départ pour les randonneurs, une terre d’estives millénaires, une pelouse infinie d’herbes et de fleurs aux sources abondantes et multiples qui devient désert de glace et de neige en hiver. Serait-ce un nouveau jardin d’Eden qui nous est présenté? Pour Jacqueline et Jacques Jarry, c’est le cas. Car la Baraque d’Aubiat est d’abord le fruit de leur affection très profonde  pour la région : « Nous y sommes très attachés et on avait envie d’y faire quelque chose. Nous avons donc étudié les différentes options. Il n’y avait pas beaucoup d’opportunité dans le domaine de la restauration alors on s’est lancés dedans ».

C’est sur une ferme en ruines que le choix d’établir l’auberge  s’est porté : « On l’a trouvée au bord de la route ce qui était l’idéal. On l’a donc retapée et transformée en restaurant. Deux ans après c’est devenu un hôtel avec sept chambres. Aujourd’hui on en dénombre quinze. On a tout de même voulu conserver le cachet originel avec les murs en pierre et les vieilles poutres ». C’est en Mai 1983 que ses portes s’ouvrent à Mazoires dans le département du Puy-de-Dôme. Un projet coup de cœur pour Jacqueline qui, à 58 ans, évoque son parcours professionnel : « J’ai travaillé depuis l’âge de douze ans. Par exemple dans le cadre d’une fin de maîtrise j’ai été professeur au Canada. Pour moi et jusqu’à aujourd’hui, ça a été boulot, boulot et boulot ! Mon mari quant à lui était animateur de plein air (moniteur de ski en hiver et de randonnée et canoë en été) ».

La mise en place du projet n’a pas été sans difficultés :  «Nous avons d’abord bénéficié d’un plan d’épargne-logement de la part des beaux-parents. Nous avons ensuite contacté des banques mais elles se sont montrées très réticentes. On demandait un crédit de 70 000 Francs qui devaient servir pour les travaux. La banque a demandé une étude par un agent de la Chambre de commerce. On nous a envoyé quelqu’un de Clermont-Ferrand sans connaissance aucune du milieu rural. Il a dressé un devis d’un montant considérable et le bilan produit était négatif. La banque en conséquence a émis un avis défavorable ».

Jacqueline & Jacques ont dû par conséquence improviser pour la suite des opérations. Fort heureusement, ils ont pu compter sur des aides locales et européennes et la solidarité des commerçants voisins : « En dépit du refus des banques, nous avons bénéficié des aides de l’Europe (FEDER) ainsi que de la région. Ca a été très facile de les obtenir car à l’époque il y avait très peu d’hôtels. On s’est donc lancés mais pas à pas : nous avons ouvert la structure avant la fin des travaux. Quand l’argent rentrait un peu, on achetait du matériel supplémentaire comme des tables ou des fournitures pour la cuisine. Nous avons reçu l’aide de commerçants très gentils qui ne supportaient pas de nous voir acheter du matériel à prix fort : ils nous ont donc livré des meubles à l’avance et nous proposaient de payer quand nous en aurions les moyens. C’est cette solidarité qui nous a permis d’exister. On leur a renvoyé la balle en achetant neuf chez eux. Nous faisons également partie du syndicat des Hôteliers ».

Un lieu d’échange, de convivialité et de partage

Pour Jacqueline Jarry, la Baraque d’Aubiat est plus qu’un restaurant : l’auberge se veut d’abord un lieu d’échange, de convivialité et de partage entre clients et gérants : «  On passe beaucoup de temps à discuter avec les gens. La convivialité est pour nous quelque chose d’absolument essentiel. Quand nous avons changé les lieux en hôtel, les gens sont revenus. C’est comme cela que ça fonctionne : quand quelqu’un vous parle dans un hôtel et se montre sympa, on a forcément envie d’y revenir ». Là est toute l’originalité de la Baraque d’Aubiat qui au-delà de son seul statut d’Auberge, cherche avant tout à créer un tissu social et humain. Une démarche qui lui permet de se constituer une clientèle de fidèles habitués : « Les gens viennent parce qu’ils parlent avec nous. C’est ce qu’on a choisi de faire ici. Tous nos clients sont généralement des habitués car nous ne sommes pas sur une route très fréquentée. Il y a bien le centre de vacances qui nous amène de la clientèle. Mais globalement nous avons une clientèle très précise ».

Jacqueline souligne néanmoins sa déception quant aux apports de la publicité faite autour de son établissement : « Il y a quelques années nous sommes apparus dans le Guide du Routard et nous y sommes restés jusqu’en 2009. Cela nous a amené des clients mais pas ce qu’on cherchait : ils se contentaient de regarder juste le prix de la chambre mais ne s’intéressaient pas au cadre ou aux gens. Ils étaient incapables d’apprécier pleinement les lieux. Ce n’est pas ce qu’on recherche ». Le bouche-à-oreille a toutefois fonctionné et parfois de façon tout à fait singulière : « Nous avons reçu un monsieur anglais qui était peintre. On a vu plein d’anglais venir par la suite. Nous avons reçu aussi une actrice anglaise qui nous a cités au cours d’une interview avec le Times. Cela a été très porteur ». Il n’en demeure pas moins que Jacqueline a une vision très claire de la clientèle idéale : « On s’est laissés vivre par rapport à la clientèle : nous préférons les gens qui viennent se promener, randonner et apprécier la tranquillité du cadre et la beauté de la nature ».

Aujourd’hui, la baraque d’Aubiat réalise un chiffre d’affaire de 130 000€ par an et se veut en grande partie une aventure familiale : « On prend des employés à partir de Pâques, souvent nos filles. On essaye de travailler le plus possible en famille. Il y a une période de trois semaines où nous devons être quatre pour des clients triés sur le volet. On a embauché hors de la famille à une époque mais plus maintenant. Pendant des années, on prenait aussi les jeunes des villages du coin mais aujourd’hui il n’y a plus personne. La distance avec les grandes villes n’aide pas non plus : on a pas envie de faire des dizaines de kilomètres pour seulement trois semaines de boulot». L’expérience, bien que positive n’est pas sans difficultés. « Cela devient de plus en plus difficile de gérer un restaurant. Avant on savait pour qui on travaillait et comment on travaillait. Aujourd’hui les nouvelles normes européennes rendent les choses difficiles ».

L’avenir de la Baraque d’Aubiat est quant à lui d’ores et déjà tracé : « Nous arrivons au terme de l’expérience et nous souhaiterions vendre l’établissement. Bien sûr nous serons heureux d’accompagner le nouveau repreneur. Si on ne parvient pas à le faire dans les conditions que l’on voudrait alors on transformera peut-être les lieux en gîte de groupe ». Jacqueline en dépit des difficultés reste profondément satisfaite de son expérience :  « Je garderai surtout en mémoire l’expérience humaine que cela à représenté : j’ai fait beaucoup de rencontres. C’est l’aspect humain du métier que je trouve absolument gratifiant. Je n’éprouve aujourd’hui aucun regret ».

Loin de la sempiternelle froideur impersonnelle des restaurants tels qu’on les connaît, c’est une toute autre expérience que Jacqueline et Jacques proposent à qui voudra bien arrêter sa voiture chez eux. Retour à la nature, échanges humains et bien évidemment plaisirs de la table sont au coeur de cette aventure au plus profond de la nature. Une occasion parfaite pour oublier les tracasseries urbaine et renouer avec le partage le temps d’un bon repas. Il n’en faudrait pas plus pour devenir à son tour un ou une fidèle de la Baraque d’Aubiat.



Un article de la rédaction du Journal de l’éco

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